
La lutte contre l’esclavage en milieu Soninké n’est pas encore gagnée. Nous n’admettons toujours pas de façon effective qu’il existe. Pouvons-nous résoudre un problème si nous ignorons son existence ? C’est une lutte universelle pouvant impliquer tout le monde. Mais en société soninké, la tendance est à la méfiance manifeste vis-à-vis de ceux qui s’intéressent de façon engagée à la question. On se refuse à croire à l’évidence que certaines bases sur lesquelles notre société repose deviennent obsolètes et qu’elles ne survivront pas longtemps aux changements des mentalités et à la révolte des esprits.
On dit de nous que nous sommes une société solidaire, vivant en harmonie. Je vais être clair. Ce n’est pas vrai. Et c’est le Soninké que je suis qui le défend.
Ce que j’observe m’inquiète profondément, et croyez-moi, ce ne sont pas des paroles en l’air. Nous paraissons inconscients de la situation chaotique que nous créons autour de nous. Pour reprendre Jean-Christophe Grange, nous semons la haine. Nous récoltons la violence, la vengeance, la mort. C’est l’héritage que nous sommes en train de léguer à la postérité. Sommes-nous prêt à endosser cette responsabilité?
Je pense que la haine a atteint son paroxysme chez nous. Je vais citer, et j’en assume la charge, une de ses conséquences à l’origine des derniers évènements violents survenus dans une localité au Guidimakha. Ceux-là m’interpellent.
A en juger par les images y afférentes qui circulent sur les réseaux sociaux ces derniers temps, sans doute, l’esclavage persiste bel et bien en milieu Soninké. En effet, il s’est une fois encore manifesté par des actes d’une violence inouïe, auxquels s’est livré un groupe de personnes dit de famille noble à l’encontre d’un homme d’extraction servile à Dafor pour un problème foncier.
La violence des images est choquante. De prime abord, c’est elle que nous observons et analysons.
Les conséquences d’une telle violence doivent capter notre attention et on se doit d’en prendre conscience.
Un homme a été frappé, blessé, ligoté et filmé en toute liberté dans un champ. Des enregistrements vidéo, j’ai pu observer la formation d’un spectacle passif et insensible autour de la scène et entendre des voix exprimer avec fierté leur consentement pour le traitement humiliant réservé à l’homme. Cet homme a une identité, un nom, et certainement une femme, des enfants et donc une famille partageant le même espace social que les spectateurs. Nous ne sommes pas en Amérique à l’époque de la traite négrière. Nous sommes à Dafor en 2021.
Je dénonce cette violence d’où qu’elle puisse naître et pour quelque raison au nom de quelque principe que ce soit. Nul n’est au-dessus de la loi et nul principe ne peut transcender la vie d’un homme.
Revoyons nos fondements pour aller de l’avant. Changeons-les s’il le faut et avançons avec le monde.
Nous faisons l’objet d’un laisser-aller, d’un abandon et d’un silence manifestes vis-à-vis de nos responsabilités envers la société. Nous avons, chacun, un devoir à son endroit : celui de veiller à la pérennisation du vivre-ensemble. Il n’est pas encore tard. Agissons !
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