Réflexion | « L’esclavage n’est pas une culture », Par Boulaye Diakité, Etudiant-chercheur en Sociologie



La culture est la somme des savoirs accumulés par l’homme. Elle est le propre de l’homme. Quelque soit la forme de l’esclavage, séquelles ou pas ne doit pas faire parti d’une culture elle doit être combattue.

La culture est au delà de toute distinction des peuples et des classes. Le mot culture qui est proche civilisation qui signifie ; arraché l’humanité de l’ignorance et l’irrationalité. Ce processus est encore loin d’être achevé chez nous. Tous les peuples ont vocation à être dans ce mouvement, malheureusement notre société reste immobile sur cette question qu’elle mêle toujours à la culture.

Bien qu’il existe une certaine opposition entre la culture et la civilisation qui est qu’on peut être civilisé sans avoir la culture. La noblesse est généralement civilisé (bien habillé, bien parfumé, etc.) me manque de culture. L’ascension progressive de certaines couches sociales qu’on assiste aujourd’hui n’est permise que par l’accumulation de la culture, symbole de savoir et de progrès.

Avant ce qu’on appelle la culture n’existe plus et ne doit plus exister, il y a d’abord la culture humaine. La culture est ce tout complexe (Edward Tylor), une définition qui se veut objective et non normative. Il y a une dimension collective. La culture ne peut pas être biologique. Le mot culture est neutre, elle permet de penser à l’humanité et de rompre avec l’approche des primitifs. Je tiens à souligner que les primitifs ne sont pas des sauvages, ils ont une culture. Tous les humains sont des êtres de culture.
Il n’y a pas de rupture entre l’homme sauvage et païen et l’homme civilisé et monothéiste. Il y a seulement une différence de degré d’avancement dans la voie de la culture. Si notre culture se réduise à des hiérarchies des castes, des éloges, quelque chose ne va pas.

Franz Boaz, Race, Language and Culture à l’inverse de Tylor, nous explique la différence entre les humains est d’ordre culturel et non racial.

On rejette les cultures dans le domaine de la nature et on les disqualifie. Le fait qu’un individu né esclave, noble, griot ou je ne sais quoi d’autre n’est ni d’ordre culturel ni même d’ordre naturel mais de l’ordre imaginaire collectif. Dans la déclaration universelle des droits « les hommes naissent libres et égaux ». Si on regarde le vocabulaire formuler pour qualifier tel est esclave, descendant d’esclave, noble, griot, imam, il y a référence à l’animalité et à la barbarie. C’est une façon de garder sa légitimité et en délégitimant les autres.

Des sociétés fondées sur le sentimentalisme et le faire plaisir sont vouées à l’échec tôt ou tard. Des sociétés qui se morcellent en plusieurs entités. L’État garant ne peut pas faire respecter les lois et la dignité humaine. Le désordre s’installe partout puisque les individus sont en perte de repère. Les chefs locaux feront régner la terreur et une justice sans base juridique.
L’esclavage quelque soit sa forme est la condition de priver un individu de toutes ses libertés. Il devient la propriété de son maître comme ses autres biens. Du moment qu’il devient le bien de son maître, il peut faire de lui ce qu’il veut. Il réduit l’humain a une chose donc les choses ne sont pas culturelles mais de l’imagination culturelle de l’homme.

Le féodal, le vantard qui pense qu’il est de race supérieure et les autres sont ces choses. Imposé sa volonté et décidé qui doit chanter, mentir, danser, diriger, etc. Parlé à son nom, être présent dans ses assemblées.

L’ordre social actuel repose sur la violence verbale. L’individu est constamment sur la menace à cause d’une forte pression sociale qui pèse sur lui. On distingue plus le réel de l’imaginaire. Notre sentimentalisme nous rend aveugle. D. Schnapper « dans la société démocratique moderne le lien entre les hommes n’est plus religieux ou dynastique, il est politique. Vivre ensemble, ce n’est plus partager la même religion ou être sujets du même monarque, c’est être citoyens de la même organisation politique ». Nous sommes tous des citoyens mauritaniens. L’égalité en droit et en dignité n’est plus quelque chose de négociable mais obligatoire. Qui le mérite !

© Crédit source : Post FB de l’auteur https://m.facebook.com/story.php?story_fbid=10208715646844295&id=1705378100

« Quelques réflexions : Que m’inspirent les événements regrettables de Kaédi », Par Béchir Fall

J’ai lu des commentaires sur ces faits et leurs conséquences. J’avoue avoir été déçu par les positions de certains intellectuels de la communauté mise en cause que j’ai scrutées avec beaucoup d’attention. Pratiquement, la plupart des amis sur la Toile que j’ai lus se cramponnent chacun à une aile des protagonistes. Et surtout l’aile dite féodale. Je ne suis pas du tout à l’aise de citer les féodaux et leurs inévitables et prétendus esclaves. Un langage encore vivace dans cette communauté. Où les débats que j’ai vus ne semblent pas prendre de distance avec ces idées rétrogrades. Et mon sentiment culmine à une exaspérante gêne à l’idée que la féodalité a de beaux jours dans cette communauté où l’on semble vénérer les chefs auxquels nos amis intellos s’adressent avec beaucoup de déférence. Aucune communauté, y compris surtout celle de mes parents bidhans, ne se comporte selon moi de cette façon.

Je n’ai pas non plus remarqué que les références à l’esclavage soient condamnées et combattues avec toute la véhémence que la persistance de ce fléau requiert sans ambiguïté.

À mon avis et sans vouloir prétendre donner des leçons je considère que l’élite de ce pays, toutes communautés confondues, doit se démarquer des considérations régressives d’un autre âge et s’en désolidariser très clairement au lieu de contribuer à leur infame persistance.

©️ Crédit source : https://news-rim.com/2021/04/11/quelques-reflexions-que-minspirent-les-evenements-regrettables-de-kaedi/

DECLARATION | Coalition Vivre Ensemble sur les évènements de Kaédi et Ouadane


La Coalition Vivre Ensemble a appris avec tristesse les affrontements entre deux groupes de la Zaawiya Mpaly Kaba de Kaédi, le 05 Avril 2021.

La CVE est d’autant plus préoccupée que ces affrontements ont occasionné de sérieux préjudices dont des blessés graves.

Ces évènements malheureux qui ont mis aux prises des personnes de la même communauté, de la même obédience religieuse, reposent la problématique du vivre ensemble chez nous et fait obligation à tout un chacun de jeter un regard critique sur les facteurs de discorde qui sont de nature à accentuer le ressentiment entre mauritaniens.

S’il est vrai que la position des protagonistes diverge sur l’origine du conflit, le danger que fait courir la crispation des positions interpelle sur la nécessité, l’impératif de prendre en compte, de façon sérieuse et objective, les problèmes relationnels entre éléments de même segment communautaire ; lesquels problèmes plongent leurs racines dans un passé où l’égalité, l’équité et l’égale dignité entre les composantes n’étaient (et ne sont toujours) ni réelles, ni prises en compte par la société qui, elle-même, reposait sur des fondements inégalitaires.

Cet héritage (commun à toutes les communautés mauritaniennes), qu’on l’appelle esclavage, séquelles de l’esclavage ou discriminations liées à la caste ou à la classe, qui engendre des frustrations – et on l’a vu des affrontements sanglants – nécessite qu’il fasse l’objet d’un large débat national pour refonder la société et la République sur des bases pérennes ; pour que les problèmes récurrents liés à cette problématique sociale ne viennent plus handicaper la marche du pays.

Autant les évènements de Kaédi, par leur gravité, interpellent, autant celui de Ouadane où une femme haratine (supposée esclave), aurait été donnée ou citée comme dot pour un mariage, ne peut être passé sous silence. Là aussi, les versions restant contradictoires sur le bienfondé ou non de l’affaire dénoncée.

Quoiqu’il en soit, devant des situations de nature à saper l’unité nationale et la cohésion sociale, la Coalition Vivre Ensemble :

– Rappelle l’impérieuse nécessité de mener une enquête indépendante et de portée nationale sur le phénomène de l’esclavage et ses pratiques associées dans notre pays;

– Invite les autorités nationales à faire la lumière, de manière impartiale, sur ces deux évènements ;

– Condamne la violence d’où qu’elle vienne ;

– Demande un large débat national autour de la problématique de l’esclavage, et de ses séquelles de l’esclavage, ainsi que toutes les discriminations liées à la caste ou à la classe sociale.

Nouakchott, le 09 Avril 2021

La Commission Exécutive

Contenu proposé par la CVE

@babacarbayendiaye
Nouakchott – 11/04/2021

©️ Crédit source : https://m.facebook.com/story.php?story_fbid=4650377574980730&id=100000256018105