Kassataya – Le village de Bélinabé, situé à 7 km de Kaëdi dont il est partie intégrante de la commune, se débat depuis quelques semaines dans un de ces conflits fonciers désormais typiques de cette vallée du fleuve Sénégal soumise aux assauts des agrobusinessmen chasseurs de terres.
L’histoire, aux dires des villageois rencontrés par Mody CISSE, Secrétaire général de l’Ajd-mr en séjour dans la région, remonte à 2014. Un bon jour, les villageois constatent que leurs anciens champs de culture se situant dans le Dieri proche (zone de culture sous pluie non inondable) sont désormais quadrillés par un grillage. Il s’agit d’un terrain d’une vingtaine d’hectares entre le poste de police de Bélinabé et le village de PimpaYel.
Renseignement pris, il s’avère que c’est la richissime famille Ould Veten qui occupe les lieux. En 2015, une délégation du village composée notamment de Mamadou Demba Diallo (conseiller municipal) Mamadou Diouni SY plus d’autres notabilités se rendent à Kaëdi auprès de monsieur Coulibaly responsable des Travaux Publics, en vue de se renseigner sur les raisons de cette occupation. Celui-ci affirme ne pas être informé de la situation.
Il leur signifie par ailleurs, qu’à sa connaissance, depuis 2007 aucun titre foncier n’est attribué. Dans le courant du mois de ramadan dernier, les jeunes du village jugeant les anciens un peu timorés, décident de prendre la situation en main. Ils enlèvent le grillage qui entourait les champs et le gardent. Les autorités locales réagissent énergiquement.
Des policiers sont envoyés sur place. Le fils de l’imam du village est mis aux arrêts et conduit à Kaëdi. Les jeunes se réunissent et prennent la décision de se rendre à Kaëdi pour réclamer la libération de leur camarade. Après la mobilisation des notables du village, le jeune est libéré.
Les jeunes villageois se réunissent avec les anciens et leur demandent de prendre leurs responsabilités par rapport à la situation. Ayant eu vent de cette rencontre, le préfet Isselkou Ould Mohamed Sghaïr convoque les notabilités du village.
Une délégation composée entre autres du chef du village, Racine Anne, de l’imam Kalidou Dahirou Anne et du conseiller municipal de Bélinabé monsieur Diallo se rend à Kaëdi.
Sont également présents à cette rencontre, Monsieur Coulibaly responsable des TP, le chef de brigade et le commissaire de police. Après avoir entendu l’exposé des représentants du village, le préfet informe la délégation de l’existence d’une commission chargée de régler les litiges fonciers dans le département présidée par lui-même.
Il reproche aux villageois d’avoir agi sans en référer à l’administration et leur intime l’ordre de restituer le grillage qui avait été enlevé du terrain occupé par la famille Ould Veten.
Lorsque les notables insistent sur le fait que le terrain en question se situe sur leurs terres de culture, le préfet leur demande de fournir un document attestant de ce fait, expliquant par ailleurs que le document en possession des villageois datant de 1911 ne concernait que les terres du Walo (zone inondable).
C’est alors que les notables rappellent au préfet que de toute façon ce terrain se situe dans le rayon de 5km autour du village, normalement non attribuable car reconnue comme espace vital des villages par la loi. Mais rien n’y fit, monsieur Isselkou Ould Mohamed Sghaïr réitère son ordre de voir le grillage restitué à la famille Veten.
De retour au village, la délégation rend compte de son entretien avec les autorités. Le vendredi 12 juillet 2016, les jeunes, remontés par cette décision qu’ils jugent injuste, décident alors de se rendre sur les lieux pour cultiver ce qu’ils considèrent toujours être leurs champs de Dieri..
Une fois sur place, ils constatent que la famille Ould Veten a remis à nouveau un grillage et des piquets autour du terrain. Ils décident de protester. Certains jeunes commencent à enlever les piquets.
Informé de la situation, le préfet envoie sur place la police. Cette fois-ci les forces de l’ordre viennent en nombre suffisant pour encercler le village de Bélinabé qui est bombardé de grenades lacrymogène. 7 personnes sont arrêtées. Le samedi 13 juillet le préfet Isselkou Oul Mohamed Sghaïr, au lieu de chercher à tempérer la situation, demande à la famille Veten de continuer les travaux sur le terrain.
Comble d’arrogance, chaque matin, il se déplace en personne en superviseur pour s’assurer que rien n’empêche l’occupation de se dérouler comme prévue. Face à cette situation, et en l’absence de tout soutien, même pas de la part des élus locaux, tous inscrits aux abonnés absents (mis à part le maire de Kaëdi Thiombé et son conseiller municipal Diallo originaire du village), les villageois décident de déposer une plainte pour spoliation.
Entre temps les 7 personnes arrêtées ont été relâchées, mais la famille Veten continue d’occuper le terrain sous la protection active de monsieur le préfet monsieur Isselkou ould ohamed Sghair.
Affaire à suivre…
Bocar Oumar BA
Crédit source : http://www.kassataya.com
Jour : 3 septembre 2016
Série des biographies des 13 détenus d’IRA : Diop Amadou Tijane, Vice-président de IRA
«Au-delà de l’horreur de la discrimination, se cache ma volonté d’aspiration à l’humanisme qui s’impose dans le cadre de mon combat »
Le dicton dit qu’un «con qui marche va plus loin qu’un intellectuel assis». L’évolution du monde s’est bâtie à coups de sacrifices pour un idéal qui transcende l’humain. Diop Amadou Tijane est, d’après ses amis et proches, «de la trame de ses intellectuels qui ont fait de la lutte pour les droits humains un sacerdoce, troquant la tranquillité d’une chaire d’Université aux rudesses d’une cellule de prison à Dar Naïm ». Condamné à 15 ans de prison le 18 août 2016 pour son implication présumée dans des troubles sociaux à Nouakchott (Affaire de la Gazra Bouamatou), Diop Amadou Tijane, qui est vice-président d’une organisation antiesclavagiste IRA, «rejoint ainsi le Panthéon des grands combattants de la liberté et des causes justes » selon ses partisans. Mais pour le ministère public et la justice mauritanienne, «sa condamnation est amplement justifiée par son implication en tant que planificateur des violences dans l’affaire Bouamatou ». Parmi ses anciens amis d’IRA qui ont fait défection, notamment Dr.Saad Ould Louleid, «il fait partit de l’aile flamiste qui s’est emparée d’IRA pour déstabiliser la Mauritanie».
Professeur à l’Institut Supérieur de Comptabilité et d’Administration des Entreprises (ISCAE) et au Sup Management ISIKOUMINIK de Nouakchott et ISI de Dakar, cadre auditeur de plusieurs institutions financières mauritaniennes et sénégalaises, Diop Amadou Tijane est membre de plusieurs ordres d’experts fiscaux, doctorant à l’Université Gaston Berger de Saint-Louis et détenteur de plusieurs diplômes supérieurs, dont un DEA en droits des affaires économiques, un diplôme spécialisé en Ressources Humaines, un DESS en Audit comptable fiscal et financier et un DESS en gestion option Finances, après une maîtrise en Analyse économique décroché à l’Université de Nouakchott.
Le combat politique
Diop Amadou Tijane a entamé le combat politique sur les bancs des universités pour avoir été plusieurs fois délégués des étudiants, puis vice-président de l’AMESE (Amicale des étudiants en Sciences économiques en 1996), président de l’association JEUN (Junior entreprise université de Nouakchott en 1997) et puis, président de la Commission d’organisation de l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar en 2000.
C’est en 2003, que Diop Amadou Tijane se lancera dans la politique informelle, en présidant le Collectif pour le Changement et l’Alternance (CCA), un mouvement de cadres mauritaniens pour le soutien de la candidature de Mohamed Khouna Ould Haïdalla. Durant cette présidentielle de 2003, il fera partie du directoire de la campagne de la jeunesse du candidat. En 2007, il co-préside en tant que vice-président, le Mouvement pour la Réconciliation Nationale (MRN) pour le soutien du candidat Ibrahima Moctar Sarr à la présidentielle de la première transition démocratique en Mauritanie.
C’est d’ailleurs au cours de la même année qu’il entrera d’une manière plus formelle dans le combat politique, en devenant vice-président de l’Alliance pour la Justice et la Démocratie-Mouvement pour la Rénovation (AJD/MR) que Sarr Ibrahima venait de créer, lors de son 1er congrès des 17 et 18 août 2007. L’année suivante, il est élu président de la Commission nationale d’implantation du parti.
Du combat politique aux droits sociaux
Délaissant le terrain de la lutte politicienne, Diop Amadou Tijane s’engage dans le combat pour les droits sociaux. Il rejoint le mouvement IRA (Initiative de résurgence du mouvement abolitionniste) un peu après sa création, en 2009, en intégrant le premier bureau exécutif du mouvement en tant que Secrétaire chargé des relations avec la diaspora.
«Au moment de la création de l’IRA, j’étais vice-président de l’AJD/MR » raconte-t-il, soulignant avoir adhéré à ce mouvement par conviction. «C’était l’organisation qui me paraissait à l’époque la seule à répondre à mes exigences de lutte contre toute forme de discrimination et qui de surcroît véhicule le message de mon idéal pour la Mauritanie, un pays débarrassé de toute forme d’injustice et d’exclusion » fait-il remarquer. En plus, Diop Amadou Tijane ajoute que IRA «recoupait une de mes vertus car j’ai l’habitude de dire que j’ai trois vertus : je crois en Allah, je crois en l’amitié et aux valeurs humaines, j’ai horreur de l’injustice et de la discrimination». Ainsi, pour lui, «au-delà de l’horreur de la discrimination, se cache ma volonté d’aspiration à l’humanisme qui s’impose dans le cadre de mon combat».
Ce n’est qu’en 2014, que l’opinion publique nationale découvre Diop Amadou Tijane. Il avait pris en main la Direction nationale de la campagne du candidat Birame Dah Abeid à la présidentielle boycottée à l’époque par l’opposition. Il termina en 2ème position, juste derrière le Chef de l’Etat sortant, créant la surprise.
Depuis lors, Diop Amadou Tijane est à l’avant-garde du combat mené par le mouvement IRA contre l’esclavage, les discriminations et les injustices sociales. Invité plusieurs fois sur les plateaux des télévisions privées, «il a su déployer un talent d’orateur hors pair, avec la modération et la retenue propre à l’intellectuel qu’il est » reconnaît ses amis d’IRA.
Lors de l’emprisonnement et la condamnation de Birame Dah Abeid et de son vice-président Brahim Bilal Ramadan le 15 janvier 2015, suite à la «Caravane contre l’esclavage foncier », il participa sans ménagement au combat pour leur libération, animant toutes les conférences de presse à côté du collectif des avocats de la défense. Il fut l’un des rares cadres du mouvement IRA qui n’a jamais intéressé les limiers du pouvoir, jusqu’à ce fatidique 29 juin 2016.
Son arrestation telle qu’il la raconte
«La journée du 29 juin, j’étais en train de travailler dans mon bureau jusqu’à ce qu’on m’apprenne par un coup de fil d’un ami, Thierno Barro, que quelque chose se passait en face de l’hôpital ophtalmologique Bouamatou. Je suis resté dans mon bureau jusqu’à 16 h 30 mn avant d’aller donner mon cours à ISIKOUMINIK. Je n’étais pas véritablement informé des événements dont m’avait parlé mon ami Barro. Le lendemain à 8 h sans mandat, six personnes vêtues en civils font irruption dans ma maison et me demandent de les suivre puisque je suis en état d’arrestation. Avant de me conduire vers une prison secrète conçue spécialement pour des terroristes. Une fois dans ma cellule, mes pieds étaient ligotés par des chaines et cadenas et 3 portes blindés se refermèrent derrière moi ».
«Plus magistral fut son intervention devant la Cour, pendant ces deux semaines de procès au cours desquelles, tant de procédures furent bafouées et tant de compromission furent dévoilées » fera remarquer son ami Wane. Le verdict du 18 août 2016 était pour lui bien clair. «Il est dicté par l’Exécutif qui commande le judiciaire dans tous les procès politiques ». Ce verdict, selon lui, vise «à entraver la liberté d’action du mouvement IRA et limiter la portée de sa légitimité politique ». Peine perdue, relève-t-il en substance, «car lui et ses camarades de cellule, sont déterminés à poursuivre leur combat et que rien ne saurait compromettre notre détermination à le poursuivre» dira-t-il.
Ce Rossossois d’origine Maghaméen
C’est le 16 février 1969 que Diop Amadou Tijane a vu le jour à Rosso. Son père, Diop Abou Demba, y servait comme instructeur au centre de formation militaire. Après sa retraite en 1974, la famille rejoignit son terroir d’origine, Maghama à l’autre bout du Fleuve Sénégal, pour s’y établir définitivement. Le petit Diop Amadou Tijane, comme tout bon Foutanké devait suivre l’apprentissage du Coran dans l’école de Thierno Saidou Ourdougal (Paix à son âme).
L’année suivante, il fit son entrée à l’école primaire de la ville tout en continuant ses études coraniques pendant sept ans, jusqu’à son entrée en 1ère année de collège. Dans la filière technique du lycée de Maghama, il sort major de tout le département.
Diop Amadou Tijane a toujours été fier de son père, Diop Abou Demba qui avait servi avec loyauté et abnégation son pays, la Mauritanie. Né en 1930 à Maghama, Diop Abou Demba s’était engagé à l’âge de 20 ans dans l’armée française. Après sa formation à Dakar Bango à Saint-Louis du Sénégal, il sera embarqué vers la France et participa à la campagne du Vietnam dans les années 1954. De retour en Mauritanie, il servit au sein de l’armée nationale, à Bir-Moghreïn puis à l’Etat-major des forces armées, surtout au centre de formation militaire de Rosso comme instructeur spécialisé en artillerie lourde. Plusieurs générations d’officiers et de sous-officiers sont ainsi passés entre ses mains, à l’image du colonel Cheikh Sid’Ahmed Babamine qui le remplacera plus tard dans son poste.
L’adjudant-chef Diop Abou Demba sera brutalement frappé de cécité et sort des rangs alors qu’il n’avait que 44 ans. Il fut admis d’office à la retraite. Parmi ses promotionnaires de l’armée nationale, le colonel Anne Amadou Babaly, dont Diop Amadou Tijane porte d’ailleurs le nom, mais aussi Yall Abdoulaye, Souedatt, Niang Ibrahima…D’autres parmi ses promotionnaires ont trouvé la mort durant la guerre du Sahara. Au niveau africain, Diop Abou Demba a eu comme promotionnaires de futurs Chefs d’Etat, comme Moussa Traoré du Mali, Aly Seybou et Seyni Kountché du Niger, André Collimba et Jean Bedel Bokassa de Centre Afrique ou encore Mathieu Kerekou du Bénin.
Diop Amadou Tijane est décrit par ses amis et ses collègues comme un patriote qui aime son pays, d’où son refus de succomber aux sirènes de l’expatriation alors que son back-ground lui offre grandes ouvertes les portes des universités à l’étranger. Ce père de deux enfants, a toujours été écartelé entre son idéalisme politique et son rigorisme scientifique. Du haut de ses 1,80 mètre, «ce grand garçon à l’air toujours jovial est plus présent sur le terrain de la réflexion et du management que sur celui de l’action » selon ses proches. «C’est un ouvrier de l’ordre social qui ne met pas directement la main à la pâte, mais conçoit l’architecture à bâtir» souligne son ami Konté. De là à associer Diop Amadou Tijane à une quelconque action violente, tous les avis sont unanimes. Sow Alioune, son camarade de combat au sein de l’IRA est formel, «Diop Amadou Tijane n’est pas un homme de terrain, et tout comme les membres de notre organisation IRA, notre combat s’est toujours inscrit dans la non-violence et l’action pacifique ».
La thèse des détracteurs
Les détracteurs du mouvement IRA sont nombreux et les plus hargneux sont, paradoxalement, leurs anciens amis qui ont fait défection. Ces derniers considèrent que le mouvement IRA a été récupéré par les Halpulaars flamistes pour d’une part, en faire un subtil tremplin pour leurs candidats à l’émigration et d’autre part, pour en faire une arme de vengeance contre les Maures. Ces derniers sont tenus comme responsables à leurs yeux des épurations ethniques qui ont particulièrement visé leur communauté durant les années de braise. Diop Amadou Tijane est ainsi cité par ses détracteurs comme l’un «des Flamistes, artisans du complot visant à déstabiliser l’Etat mauritanien en préparant les terreaux de la guerre civile sur la base des tensions ethno-communautaires en se servant du mouvement IRA comme cheval de Troie».
Dr.Saad Ould Louleid, ancien porte-parole du mouvement IRA, a publié plusieurs diatribes sous forme de déballage, révélant ce qu’il considère être «les secrets coupables du mouvement IRA ». Pour prouver le double jeu du mouvement sur le plan international et sur le plan national, il a personnellement accusé Diop Amadou Tijane d’avoir perçu lors de la campagne présidentielle de 2014 un montant de 7 millions d’UM versés par des proches du pouvoir pour soutenir la campagne de Birame Dah Abeid.
Durant son réquisitoire pendant le procès sur «l’affaire de la Gazra Ould Bouamatou » qui a valu à Diop Amadou Tijane une peine de 15 ans de prison, le Ministère Public accuse ce dernier d’avoir été l’un des planificateurs des troubles ayant conduit à l’attaque contre les policiers, attaque qui s’est soldée par la blessure de plusieurs policiers (dont certains dans un état grave) et l’incendie de leur véhicule.
Thèse que la défense a balayé d’un coup de toge, estimant que non seulement, les preuves de telles accusations étaient inexistantes mais aussi que la Cour a commis deux fautes de procédure, en violant d’abord l’article 278 du Code des procédures pénales qui interdit l’introduction de tout matériel photo ou audiovisuel en salle d’audience, et ensuite, de n’avoir pas pris les dispositions prévues par la loi sur la torture, en refusant de prendre en compte les plaintes déposées par Diop Amadou Tijane et ses compagnons pour sévices et traitements cruels inhumains dégradants.
Crédit Source : Cheikh Aidara, journaliste via la page Facebook les 13 détenus d’IRA
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