L’esclavage en Mauritanie: Adoption du projet de loi n°052/15

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L’Assemblée nationale a approuvé en sa séance plénière Mercredi 12 Aout 2015, à l’unanimité sous la présidence de Mohamed Ould Boilil son président le projet de loi n ° 052/15, qui annule et remplace la loi n ° 2007/048 2007 portant incrimination de l’esclavage et réprimant les pratiques esclavagistes

Le gouvernement était représenté au cours de cette plénière par le Ministre de la Justice Monsieur Brahim Ould Abdallahi Ould DADAH

Ce projet de loi comprend 26 articles. L’article 2 de ce projet de loi stipule que l’esclavage constitue un crime contre l’humanité et qu’il est imprescriptible, alors que l’article 3 définit les cas qui peuvent être considérés comme esclavagistes.

Les articles de 7 à 19 définissent les infractions relatives à l’esclavage et aux pratiques esclavagistes et leurs sanctions. Les articles de 20 à 26 fixent les procédures liées à la constitution des tribunaux compétents, et permettent aux associations des droits de l’homme reconnues de dénoncer les infractions à la présente loi et d’assister les victimes.

L’assemblée nationale avait adopté les amendements proposés par la commission de la justice, de l’intérieur et de la défense et portant sur les articles 3, 17, 19, 20.

Ces amendements concernent l’introduction de deux cas de figure pouvant constituer des cas d’esclavage en plus de cas stipulés par l’article 3; l’augmentation des amendes prévues par l’article 17 contre l’auteur de production culturelle ou artistique faisant l’apologie de l’esclavage.

Les amendes prévues par l’article 19, qui punissent quiconque profère en public des propos injurieux envers une personne considérée esclave, ont été révisées à la hausse.

Les amendements apportés à l’article 20 introduisent un paragraphe stipulant que la formation et les informations relatives à l’incrimination des pratiques esclavagistes feront partie des programmes de la formation obligatoire et continue des personnels civils et militaires chargés de l’application de la loi, notamment au niveau de l’administration territoriale et des autorités sécuritaires.

Dans son exposé devant les députés, le ministre de la justice, Me Brahim Ould Daddah a indiqué que le pays traverse une phase cruciale qui requiert, à la fois, l’éradication de toutes les pratiques répréhensibles du passé, la promotion et la vulgarisation de la culture de justice, d’équité, de tolérance et d’esprit de citoyenneté ainsi que la création des conditions propres à encourager la promotion sociale et le développement.

Il a ajouté que ce projet de loi vise une relecture du projet de loi 48/2007 en vue de l’adapter aux résultats du dialogue entre la majorité et certains partis de l’opposition et à certaines conventions internationales ratifiées par notre pays, d’une part, et de combler les lacunes constatées lors de l’application de la loi, d’autre part.

Le ministre a énuméré ces lacunes dont, entre autres, l’absence d’une terminologie précise, l’insuffisance des mesures répressives, ou encore les difficultés liées à l’exécution des mesures de dédommagement des victimes.

Le ministre a passé en revue les reformes principales apportées par ce projet de loi, notamment la définition des terminologies, la requalification des 10 délits esclavagistes en crimes, la création de tribunaux spécialisés où exerceront des magistrats spécialisés et d’un cabinet d’investigation. Le juge, une fois saisi d’une infraction relative à l’esclavage et aux pratiques esclavagistes, est tenu de préserver les droits à réparation des victimes.

Les décisions judiciaires prévoyant des dommages et intérêts aux victimes de l’esclavage et des pratiques esclavagistes sont exécutoires nonobstant opposition et appel a précisé le ministre, faisant remarquer que le gouvernement promulguera avec la célérité requise, les décrets d’application de ce projet de loi après son adoption.

Me Ould Daddah a estimé que le présent projet de loi mettra fin à certaines pratiques esclavagistes telles que la violation et le mariage forcé, tout en mettant l’accent sur la grande responsabilité qui incombe à la société pour réaliser un changement vers le mieux et renforcer la cohésion sociale.

Le ministre a réaffirmé la détermination du gouvernement à éradiquer toutes les formes d’esclavage, rappelant que les amendements adoptés qualifient l’esclavagisme comme crime contre l’humanité et précisé que l’adoption par le conseil des ministres du 06 mars 2014 d’une feuille de route pour l’éradication des séquelles de l’esclavage vise le renforcement de la cohésion sociale et l’amélioration du niveau de vie des couches vulnérables.

Dans leurs interventions, les députés ont loué ce projet de loi qui constitue une avancée significative et traduit une volonté politique ferme de mettre fin à ce phénomène.

Ils ont apprécié l’approche participative mise en oeuvre par le gouvernement pour lutter contre l’esclavagisme. Une approche qui s’articule autour de l’élaboration des lois incriminant ce phénomène, la mise en place des projets de développement fiable ciblant particulièrement les franges de la société qui souffrent des séquelles de l’esclavage.

Les députés ont exhorté le gouvernement à appliquer strictement ce projet de loi qui, selon eux, constitue le premier texte réaliste et applicable pour lutter contre le phénomène de l’esclavage.

Ils ont appelé à la généralisation des tribunaux compétents dans toutes les wilayas pour que toutes les victimes puissent profiter de leurs services. Il ont demandé aux politiciens et aux activistes des droits de l’homme d’éviter d’exacerber les clivages sectaires à des fins personnelles au détriment de la cohésion et de la solidarité du peuple mauritanien.

Les députés ont mis en exergue l’importance d’organiser des campagnes de sensibilisation dans toutes les zones du pays pour édifier les citoyens sur le contenu de ce projet de loi et pour leur rappeler leurs devoirs et obligations ainsi que le rôle qu’ils peuvent jouer au service de l’intérêt commun et de la cohésion sociale.

Ils ont, en outre, rappelé à l’ensemble des départements ministériels la nécessité de s’acquitter convenablement de leurs rôles dans la mise en oeuvre et le suivi de la feuille de route pour l’éradication des séquelles de l’esclavage.

Assemblée Nationale

Crédit source: Rapide Info

SoninkIdees-J’ose by K.S

Note d’alerte : Les mentalités féodales rongent les mauritaniens de l’intérieur comme de l’extérieur.

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A Monsieur le Président de la République Islamique de Mauritanie,
Aux membres du Gouvernement de la République Islamique de Mauritanie,
Aux membres de la diplomatie Mauritanienne,
Aux chancelleries étrangères en Mauritanie,
Aux élus de la République Islamique de Mauritanie,
Aux ONG et représentants de la société civile Mauritanienne,
Aux ONG internationales,

Nous, associations et défenseurs des droits humains basés à l’extérieur, interpellons les autorités mauritaniennes sur certains faits graves liés aux mentalités féodales et au système des castes qui minent la société Mauritanienne.
Depuis quelques années, en parallèle des problématiques liées au racisme, à l’esclavage et à ses diverses séquelles, nous assistons à des tensions graves au sein de nos communautés nationales de la diaspora mauritanienne en Europe dont des cas avérés en France et en Espagne.
En effet, il est connu de tout mauritanien sincère, que la stratification sociale est transcommunautaire chez nous, et certaines stigmatisations suivent les dits castés inférieurs (les ‘Komos’ en langue Soninké ou esclaves et les ‘Niakhamalo’ regroupant griots, forgerons, bucherons, cordonniers etc.) dans toutes nos structures ethniques. Aujourd’hui, cet état de fait constitue le déclencheur d’une alerte inquiétante auprès de la nouvelle génération d’extraction servile. Celle-ci refuse avec vigueur toutes les velléités de domination venant des milieux féodaux, lesquelles sévissent toujours même ici en occident, derrière les murs et surtout  au sein  de nos structures villageoises. 
En  Mauritanie,  les tensions liées  à la féodalité  réapparaissent   comme un phénix  à chaque  fois que les enjeux  sont  importants et  quand surtout  ceux-ci  impliquent des personnes  d’extraction servile.  Les illustrations  ne  manquent pas : dans le  village de  Goïnitt dans le Guidimakha, la  féodalité   refuse  un projet  de point  d’eau  sous prétexte  que l’initiative  leur vient des « komos » ou esclaves ; dans celui de Testaye,  un autre projet de construction  d’une  école « Medersa » est bloqué   par la féodalité  toujours sous le même fallacieux prétexte  que  la chefferie  villageoise ne leur appartient pas, et donc aucune attribution d’une aire ne pourrait être accordée aux anciens esclaves « komos »  peu importe la faisabilité du projet. Cette  mentalité   digne du code noir  est  à combattre   sur tous les fronts.
Les partis  politiques ne sont pas épargnés par le phénomène. Il arrive que l’investiture   d’une personne d’extraction servile  donne lieu  à de vives tensions  voire  de la transhumance politique. Certaines familles  de la chefferie  traditionnelle  affirme sans complexe que : « Etre maire, c’est  comme être chef de village ». Une telle mentalité   ne tend guère  vers  la paix   et la concorde sociale.
Ces dernières années, quelques bagarres ont eu lieu entre ressortissants mauritaniens en France et en Espagne sur cette problématique. La dernière en date s’était passée en Juin 2015 à Almeria en Espagne, où, à la suite d’échanges acerbes entre deux ressortissants mauritaniens du milieu soninké, l’un aurait traité l’autre de fils d’esclaves qui ose se rebeller. Esseulé, le monsieur à l’esprit féodal et plus âgé, a voulu frapper le jeune qui n’a cessé de se plaindre en se défendant de toutes ses forces. La suite des événements a été marquée par l’intervention de la police alertée par le voisinage.
En Juillet 2015, dans la région du Guidimakha, département de Ould-Yengé, une bagarre similaire s’est produite. Elle a impliqué des membres de la famille du Ministre de l’Education Nationale dont la victime fut jetée en prison par abus de pouvoir, sans ménagement.
Le but de notre alerte est, avant que l’irréparable ne se produise un jour dans nos communautés expatriées chez lesquelles l’ignorance prédomine, de solliciter les pouvoirs publics mauritaniens d’initier une campagne de sensibilisation et d’assistance dans  le cadre de la lutte contre l’esclavage à l’intérieur comme à l’extérieur.
Soucieux de l’impérieuse nécessité d’éradiquer ce fléau afin de permettre un cadre de vie digne et démocratique, nous demandons aux autorités Mauritaniennes :
De prescrire comme délit dans le code pénal Mauritanien l’apologie de la notion de supériorité basée sur l’appartenance sociale  par des cadres, intellectuels et autres (certains répondant au nom de chefferies villageoises)  au même titre que la loi incriminant  l’esclavage, et ce avec à la clef des amendes fortes, dissuasives afin de changer les mentalités rétrogrades ;
de punir par la loi les apologistes publics  qui entretiennent à travers des animations, des chants et des danses, les complexes de supériorité ou d’infériorité  par  le biais  des coutumes ancestrales : (Niaxamala, Gawlo, Iguiw ou Griots etc.)  au sein de nos sociétés, tribus ou castes dont le seul but est d’humilier, de diminuer l’Homme, et de lui soustraire des fonds par harcèlement verbal, moral  ou  régler des comptes  avec certaines catégories de la société ; une situation de faits qui incite à la haine, au mépris de l’autre, polluant ainsi l’ambiance naturelle au point de menacer la sérénité, l’unité et la cohabitation entre  les citoyens ;
De lever les tabous autour de la féodalité et ses corollaires ;
De prendre des mesures fortes et dissuasives en cas de récidive : condamnation à des peines de prison ferme ;
D’intégrer, par amendement, dans les lois, des actes concernant les questions spécifiques liées aux discriminations féodales  sur l’immatériel et le matériel notamment sur le foncier régi sous un régime moyenâgeux dans certaines contrées.

De nos jours, l’esclavage en milieu de nos communautés noires est maquillé. Chacun pourrait lui donner les couleurs qui lui conviennent à sa guise. Il est caché puisse qu’il n’est pas physique. Il est appliqué en interne des familles qui en font leur socle de vie de telle sorte que le rapport esclave-noble et autres castes de basse classe composées des diverses catégories des ‘Niakhamalo’ (griots, forgerons, bucherons, cordonniers etc.) est entretenu inconsciemment, ou naturellement, ou de bon gré pour perdurer dans le temps. C’est l’esclavage de coutume entretenu par les nobles de coutume.

Les conséquences de sa nouvelle forme sur les rapports humains, que nous appelons communément les séquelles, sont nombreuses. Le cas est tellement complexe que les autorités doivent procéder à un diagnostique profond et minutieux pour atteindre le nœud de la question afin de trouver la clef à la solution sur mesure et selon les cas.

Les conflits récurrents dont certains, ici,  évoqués et d’autres étouffés, ternissent l’image de la Mauritanie et contribuent à l’insécurité au sein de notre communauté extérieure. En effet, la multiplication des conflits incitera la presse étrangère à s’y intéresser, d’où une surexposition possible.
L’État mauritanien doit prendre ses responsabilités tant sur le plan interne qu’externe : créer un arsenal juridique dissuasif et mener une campagne de sensibilisation conséquente.
Les ONG signataires :
ARMEPES-France: Association des Ressortissants Mauritaniens pour l’Éradication des Pratiques Esclavagistes et ses Séquelles
A.H.M.E : Association des Haratine de Mauritanie en Europe 
IRA-Mauritanie : L’Initiative de Résurgence du Mouvement Abolitionniste
O.C.V.I.D.H : Organisation Contre les Violations des Droits Humains en Mauritanie
Date : le 12 Août 2015

SoninkIdees-J’ose by K.S